Bonsoir à tous,
Voici une synthèse du document de la FAA sur la transition vers les avions à train classique (ceux avec la roulette à l'arrière), rédigée pour être claire et accessible.
Contrairement aux avions-écoles modernes (train tricycle, avec la roue avant), les trains classiques ont un comportement très différent au sol et sont connus pour être beaucoup moins pardonnants.
Voici les points essentiels à retenir.
1. Le Cœur du Problème : L'Instabilité au Sol
La différence fondamentale vient de la position du centre de gravité (CG).
- Avion tricycle (roue avant) : Le CG est devant le train principal.
- Avion classique (roulette arrière) : Le CG est derrière le train principal.
Conséquence : L'avion est
fondamentalement instable au sol. Imaginez pousser un chariot de supermarché à l'envers ; les roues veulent toujours s'inverser. Pour un avion, cela signifie que dès qu'il commence à dévier (un virage, un coup de vent), son propre élan (son inertie) va
accentuer cette déviation, et non la corriger.
C'est la cause de presque toutes les difficultés.
2. Le Roulage (Taxi) : Tout se Joue avec les Pieds
Le roulage en train classique est un art en soi.
- Visibilité : On ne voit rien droit devant ! Le moteur et le nez de l'avion masquent la vue. Pour voir où l'on va, on est obligé de rouler en faisant des lacets (S-turns).
- Contrôle du vent : C'est crucial.
- Vent de travers avant : On met le manche dans le vent (pour empêcher l'aile au vent de se soulever) et on tire le manche vers soi (manche au ventre) pour plaquer la roulette arrière au sol et garder le contrôle directionnel.
- Vent de travers arrière : On met le manche à l'opposé du vent, et (si le vent est fort) on pousse le manche vers l'avant pour éviter que le vent ne soulève la queue.
- L'Effet Girouette (Weathervaning) : L'avion veut en permanence s'orienter face au vent, comme une girouette. C'est parce que la surface du fuselage derrière les roues (le point de pivot) est très grande. Il faut constamment utiliser le palonnier (la commande de direction au pied) pour contrer cet effet.
La règle d'or : Toujours,
toujours rouler lentement.
3. Le Décollage : Attention à la Précession
Le décollage se fait en deux temps :
- On accélère, manche au ventre pour garder la queue au sol.
- Rapidement, on pousse sur le manche pour lever la queue de l'avion. L'avion se met alors à plat (en "ligne de vol") pour accélérer.
Le piège : Au moment où vous levez la queue, l'hélice (qui est un gros gyroscope) va réagir. C'est ce qu'on appelle la
précession gyroscopique. En levant la queue (mouvement à piquer), l'avion va brutalement faire une embardée (un lacet)
vers la gauche. Il faut être prêt à contrer immédiatement avec le palonnier (pied à droite).
4. L'Atterrissage : Le Moment de Vérité
C'est là que la différence est la plus grande.
Impératif absolu : L'avion doit toucher le sol en étant
parfaitement aligné avec l'axe de la piste. Pas de dérive, pas de "crabe". Si vous touchez "en crabe", le fameux "cheval de bois" (voir point 5) est presque garanti.
Une fois posé, l'avion n'est pas stable. L'aile a toujours de la portance et l'avion veut continuer à voler. L'atterrissage n'est terminé que lorsque l'avion est à l'arrêt complet.
Il y a deux techniques principales :
- L'atterrissage 3 points : C'est la méthode classique. On fait un arrondi très prononcé jusqu'à ce que l'avion atteigne son angle d'attaque maximal, et les trois roues (train principal + roulette de queue) touchent le sol en même temps.
- L'atterrissage de roues (Wheel Landing) : On se pose à une vitesse plus élevée, dans une assiette plus plate. On pose d'abord uniquement le train principal, la queue restant en l'air. C'est souvent préféré par vent de travers, car on garde plus de vitesse et donc plus d'efficacité sur les commandes.
Action cruciale post-atterrissage : Dès que la roulette de queue est au sol, il faut tirer le manche à fond vers soi (manche au ventre). Cela plaque la queue au sol et rend la roulette de queue efficace pour garder l'avion droit pendant qu'il ralentit.
5. Le Danger : Le "Cheval de Bois" (Ground Loop)
C'est le risque majeur. Un cheval de bois est un
virage serré et incontrôlé au sol.
Comment ça arrive ?
Vous atterrissez avec un peu de dérive, ou un coup de vent vous fait dévier. L'avion commence à tourner.
Rappelez-vous : le CG est derrière les roues. L'inertie de l'avion va donc tirer la queue vers l'extérieur du virage, ce qui augmente la rotation. C'est une boucle qui s'auto-alimente. En une fraction de seconde, l'avion peut faire un 180°, casser son train d'atterrissage ou frotter le bout d'aile au sol.
La seule parade : Des réflexes ! Il faut contrer la moindre déviation
immédiatement avec une action ferme et rapide sur le
palonnier opposé et, si besoin, un coup de
frein différentiel (le frein du côté intérieur du virage).
En résumé : Le pilotage d'un train classique, c'est 90% de travail au palonnier ("les pieds"). Il faut être constamment attentif, anticiper les réactions de la machine et ne jamais relâcher sa vigilance au sol. C'est plus exigeant, mais c'est ce qui fait tout son charme !